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Newcastle passe au naming : une tabula rasa du passé ?

Publié par Thomas Mollanger sur 13 Novembre 2011, 13:44pm

Catégories : #Sport & marques

http://static.foot01.com/img/images/650x600/2011/Nov/10/newcastle-voit-st-james-park-changer-de-nom-iconsport_spi_210810_75_10,27088.jpg
Inauguré le 16 octobre 1880, St James’ Park, le stade de football de Newcastle, cède à son tour au naming pour devenir le futur « Sports Direct Arena ». Un nom on ne peut plus commun.


Cela faisait déjà plusieurs mois que la direction des Magpies discutait de l’idée. La voilà désormais officialisée par la voix même de Mike Ashley, le propriétaire de Newcastle. S’inscrivant dans les dernières tendances de recherches de fonds, le naming est de plus en plus perçu comme un moyen efficace et surtout très rentable de relier un club de sport à une marque. Il s’agit d’une véritable pratique de parrainage qui consiste à donner à une enceinte sportive le nom d’une marque ou d’une société parraineuse. Les accords portent généralement sur le long terme, une durée comprise entre quinze et trente ans. Cette pratique a évidemment pour tendance de nuire à l’identité du club, de plus en plus similaire à la marque qui parraine plutôt qu’à son histoire.
Les termes sont jetés. Dans un club aussi historique que Newcastle, l’opération de parrainage par une marque extérieure (on retrouve de nombreux cas de parrainages où l’identité du club n’est pas touché puisque la marque s’inscrit dans un tissu géographique et historique similaire au club ; on pense notamment à Casino et à l’Association Sportive de Saint-Etienne avec la réussite que l’on connait) ne nuit-elle pas à l’identité d’un club qui se tournerait de plus en plus vers la recherche de nouveaux sponsors plutôt que vers son histoire ? La question reste en suspens car ce n’est pas parce qu’un stade adopte le nom d’une marque qu’il perd son identité. On le sait, il n’y a pas d’identité sans mémoire. Sans histoire.

Et force est de constater que le St James Park’s ne manquait pas d’histoire ! Une capacité de 52 387 places et un record d’affluence de 68 386 spectateurs contre Chelsea le 3 septembre 1930. Cela faisait 119 ans que le stade des Magpies s’appelait ainsi. Inauguré le 26 octobre 1880, il accueillit le Newcastle United Football Club dès 1892 c’est-à-dire dès la fondation du club suite à la fusion entre le club de Newcastle East End et celui de Newcastle West End. Propriété de Freemen of Newcastle upon Tyne, le St James Park’s est le lieu de consécration d’un des clubs les plus titrés d’Angleterre : une coupe Intertoto, une coupe des villes de foires, une coupe anglo-italienne, quatre championnats d’Angleterre (le dernier remontant à 1927), six coupes d’Angleterre, un Community Shield ! Bien que connaissant une première opération de naming en 2009, le stade devînt le sportsdirect.com @ St James' Park Stadium, le nom originel du stade ne disparut pas.

C’est donc une véritable révolution qui va frapper le club du nord de l’Angleterre. Bien que se positionnant souvent comme un club particulier, hors du système Manchester/Londres, Newcastle cède aux sirènes du naming à l’image des clubs qu’il a si souvent critiqué : l’Emirates Stadium d’Arsenal, le Reebok Stadium de Bolton ou encore le Etihad Stadium de Manchester City. Du point de vue de la gestion financière et économique du club, on ne peut que saluer l’opération. Le partenariat sera double et sur du long terme comme l’a défendu le directeur marketing, Derek Llambias, sur la BBC, alors que les opposants à ce changement, comme on pouvait s’y attendre, sont nombreux. Il sera question non seulement du naming, mais aussi d’un sponsor sur le maillot. Pour calmer la vindicte, Derek Llambias a donné les chiffres de l'arrangement : £10M soit 11,5 millions d'euros, ce que cela rapportera chaque année aux Magpies.

Pour autant, une opération de naming s’oppose-t-elle fondamentalement à l’histoire d’un club ? Certes le stade tire souvent son nom d’une personnalité historique liée au club, notamment en France avec Geoffroy Guichard à Saint-Etienne ou Jacques Chaban-Delmas à Bordeaux. En Angleterre, c’est souvent le nom d’un quartier de la ville (et on connait l’importance de l’attachement au quartier en Angleterre) qui prévaut : Stamford Bridge à Chelsea ou Anfield à Liverpool. En perdant son nom, lié le plus souvent à l’origine géographique du club, l’identité du club n’en souffre-t-elle pas ? Certes au premier abord il semblerait que l’identité du club pâtisse du naming. Les supporters les plus attachés au club perçoivent généralement ces opérations comme de véritables trahisons et des négations de l’identité du club. Les vindictes populaires à Newcastle s’inscrivent tout à fait dans cette logique. Toutefois, il faut veiller à ne pas produire de trop fâcheux raccourci. Car, dans la plupart des cas, l’histoire du club est récupérée par la direction sportive pour être mise en scène d’une façon différente. A la marque le nom du stade, au club la charge de mettre en scène différemment le passé, la mémoire. Ainsi, l’Emirates Stadium d’Arsenal a décidé de rendre hommage au mythique Highbury en associant son nom au cœur du nouveau système libéral, les bureaux. Autrement dit, le lieu perçu comme antihistorique par les ultras porte désormais le nom du stade historique des Gunners ! De même, le buste d'Herbert Chapman a été exposé dans le hall d'entrée. Les deux ponts qui passent au-dessus de la ligne de chemin de fer ont été appelés le Clock End et le North Bank. L'horloge d'Highbury (la fameuse Clock End) a été encastrée dans la façade de l'Emirates Stadium, en face du pont du même nom. En France, les projets de muséification fleurissent. C’est le cas à Saint-Etienne comme à Marseille, les deux clubs les plus populaires de France. Alors certes le nom du stade, élément le plus visible d’un club (avec la couleur du maillot), porte désormais le nom d’une marque. Toutefois, dans la plupart des opérations de naming, il y a bien plus une continuité qu’une rupture avec la mémoire et le passé du club. Il est dans l’intérêt de la marque que le club ne perde pas ce qu’il a de plus fort, son identité. Et il est également dans l’intérêt du club de tenter de joindre, à l’heure du libéralisme exacerbé dans le monde du sport, intérêt économique et identité. Les fans de Manchester City en sont la preuve. Fiers de leurs origines ouvrières et de leur quartier, ils sont désormais bien loin de dénigrer un club où la mondialisation et le libéralisme sont maîtres ! Ils continuent au contraire de revendiquer leurs origines, assurant par la même occasion une identité transgénérationnelle, et perçoivent comme une chance l’arrivée de nouveaux investisseurs. Espérons que Newcastle saura ne pas faire table rase de son passé dans cette opération de naming. Quoiqu’il en soit, si jamais la direction n’y arrive pas, les irréductibles supporters seront toujours là pour le leur rappeler...

 

Article réalisé par Thomas Mollanger l Image : Iconsport

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