Un an ! Pendant un an on l'a attendu. Le 2 juillet dernier, il s'est enfin élancé pour notre plus grand plaisir. Et aujourd'hui c'est déjà fini. Ces trois dernières semaines sont passées tellement vite, qu'on croirait que la Grande Boucle a commencé hier. Après 21 étapes de bonheur ou de tristesse, de surprise ou de déception, de confirmation ou de désillusions, retour sur l'histoire des maillots distincifs durant l'épreuve. Avec, bien entendu, le jaune pour commencer.
Le rêve éveillé de Thor Hushovd
La première étape se disputant en ligne, il n’y avait pas que la victoire aux Monts des Alouettes à aller chercher. Le plaisir était complet pour le lauréat du jour puisqu’il recevrait aussi le maillot jaune. Philippe Gilbert, le favori, tenait son rang. Dominateur dans la dernière bosse, le Belge échangeait sa tunique du champion de Belgique contre le jaune. Un certain Eddy Merckx avait déjà connu un tel bonheur avant lui. Mais le coureur d’Omega Pharma-Lotto n’aura pas la même réussite que son illustre compatriote. Dès le deuxième jour de course, un contre-la-montre par équipes était au programme. Difficile pour Omega Pharma de lutter et donc impossible pour Gilbert de conserver la place de leader. Au prix d’une belle première étape, finie à la troisième place, et d’un bel effort collectif de Garmin-Cervélo dans le chrono, Thor Hushovd héritait du jaune. La suite, on la connaît, personne ne parvenait à déloger le Norvégien. Mûr-de-Bretagne, Super-Besse, deux arrivées en côte qui auraient pu faire craquer Hushovd, mais il s’arrachait à chaque fois pour garder sa seconde d’avance sur Cadel Evans. Finalement c’est un fait de course qui obligeait Hushovd à renoncer à son beau maillot qu’il aura tout de même porté une semaine. Impressionnant !
Voeckler, toujours dans les bons coups
Ce dimanche 10 juillet fut donc fatal pour Hushovd, et le retour sur la plus haute marche de Thomas Voeckler. Sept ans après son épisode de dix jours en jaune, l’ancien champion de France reprend le pouvoir sur le Tour, certes bien aidé par une terrible chute dans le peloton. A une centaine de kilomètres de l’arrivée, en direction de Saint-Flour, une partie de la troupe chute. Certains tombent dans le ravin, comme Alexandre Vinokourov. Le Kazakh ainsi que Jürgen Van den Broeck notamment doivent quitter la course. Encore deux outsiders de moins dans cette Grande Boucle qui ne fait aucun cadeau à ses prétendants. Suite à cette chute le peloton ralentit, si bien que Voeckler comprend qu’il tient là une très grande chance de revêtir le maillot jaune. Très peu relayé par ses compagnons d’échappée, c’est en roulant seul qu’il va maintenir un écart assez important sur la ligne pour monter sur le podium. Au panache. Du grand Voeckler. Durant deux jours il aura pu profiter pleinement de sa belle tunique. Le temps de rejoindre les Pyrénées.
Un héros national nommé Thomas Voeckler
Pour autant, ce n’était pas fini ! Que dire de sa remarquable ascension vers Luz-Ardiden ne concédant qu’une demi-minute aux meilleurs. On retiendra surtout celle de Super Beille. Au départ, beaucoup pensaient que le Français allait perdre le maillot au sommet du dernier col du jour. Il n’en fût rien ! Mieux encore, Voeckler, en personne, se payait le luxe de ramener à la raison tous les favoris. Aucune accélération ne le faisait craquer. Il a même eu le culot de placer quelques attaques. Sur la ligne, Thomas Voeckler ne concédait pas une seule seconde aux meilleurs grimpeurs mondiaux. Il aura fait jeu égal avec eux dans les Pyrénées, laissant la France espérée de grandes choses pour la suite de la Grande Boucle. Et ses supporters n'allaient pas être déçus. Malgré un coup de moins bien sur l'étape qui menait à Gap et une perte de vingt secondes sur Evans, Contador et Sanchez, Voeckler pensait à se reprendre vers Pinerolo. Cette fois c'est la malchance qui lui faisait perdre une demi-minute. Sorti de la route dans la descente finale, le maillot jaune à frôler la correctionnelle. Du coup c'est sans aucune pression qu'il abordait la haute montagne dans les Alpes.
Phénoménal Tour de France !
On dit que le maillot jaune donne des ailes, Voeckler en aura fait l'expérience. Lui le coureur "passe partout", plutôt bon grimpeur sans toutefois appartenir à la caste des très grands, se sera découvert une qualité inexplorée sur ce Tour. Eh bien oui, la montagne est devenue une spécialité de celui qu'on surnomme Ti-Blanc. Revenons quelques jours en arrière, le jeudi 21 juillet. L'étape reine du Tour avec l'enchaînement Col d'Agnel, d'Izoard et du Galibier. Un trio infernal qui devait faire le ménage au classement général. Un trio infernal qu'allait surmonter de la plus belle des façons le Français. Longtemps mis en danger par Andy Schleck, parti très loin de l'arrivée, Voeckler a bien crût perdre sa place de leader. Puis le tempo terrible réalisé par Evans dans le Galibier faisait craquer un à un les favoris : Contador, Sanchez, Cunego. Mais Voeckler était toujours là. Personne n'y croyait pourtant le double champion de France, au prix de derniers kilomètres de folie, conservait le jaune pour quinze secondes devant Andy Schleck. A trois jours de Paris. Mais il restait encore de grosses échéances. Le vendredi, l'arrivée était placée au sommet de l'Alpe d'Huez. Terme d'une étape courte (105 km), mais terrible avec le col du Télégraphe, le Galibier et donc "l'Alpe". Trop dur pour un Thomas Voeckler épuisé mais qui aura fait vibrer la France entière. Il n’y a qu’à s’incliner : « Chapeau ».
Si Voeckler était lâché vers l’Alpe d’Huez c’est en partie à cause d’une étape de folie. On en avait imaginé des scénarios, mais celui-là était simplement imprévisible. Dès les premières pentes du col du Télégraphe, après seulement dix kilomètres de course, Alberto Contador plaçait une première banderille. Seuls Evans, les frères Schleck et Voeckler parvenaient à le suivre. Mais à force d’accélérer, l’Espagnol faisait craquer Frank Schleck et Cadel Evans. Voeckler était distancé juste avant le sommet du Télégraphe. Seul dans le Galibier, on croyait bien que le Français allait revenir sur les deux grands grimpeurs. Finalement il explosait, à la limite de la rupture dans les derniers hectomètres du Galibier. Grâce à son équipe, le coureur d’Europcar revenait sur le groupe de tête au pied de l’Alpe d’Huez, mais sautait dès les premiers lacets. Le maillot jaune était perdu, et sans grande surprise Andy Schleck le revêtait à la veille du contre-la-montre décisif.
Cadel Evans dans l'histoire !
Finalement c'était bien lui le meilleur, du moins sur le chrono. Il n'y avait rien à faire. L'Australien n'aura pas laissé sa chance, n'aura pas laissé Andy Schleck croire à la victoire finale bien longtemps. Le coureur de BMC aura fait une démonstration autour de Grenoble. En réalisant 2'30'' de moins que le Luxembourgeois, Evans aura littéralement assommé la concurrence par son aisance. Après avoir été le premier Australien champion du monde en 2009, il devient le premier "Aussie" à remporter la Grande Boucle, avec en prime une victoire d'étape à Mûr-de-Bretagne. A 34 ans, il ne pouvait plus laisser passer sa chance de finir en jaune à Paris. Dans le Galibier il aura assumé son rôle de favori, s'est accroché dans l'Alpe d'Huez et a porté le coup de grâce samedi. Bravo Monsieur Cadel Evans. Le Tour 2011 aura été extraordinaire, et a un très grand vainqueur. Rendez-vous le 30 juin 2012 pour défendre ce titre.
Classement général final:
1. Cadel Evans (AUS, BMC Racing Team) en 86h12'22"
2. Andy Schleck (LUX, Leopard-Trek) à 1'34"
3. Frank Schleck (LUX, Leopard-Trek) à 2'30"
4. Thomas Voeckler (FRA, Team Europcar) à 3'20"
5. Alberto Contador (ESP, Saxo Bank-SunGard) à 3'57"
6. Samuel Sanchez (ESP, Euskaltel-Euskadi) à 4'55"
7. Damiano Cunego (ITA, Lampre-ISD) à 6'05"
8. Ivan Basso (ITA, Liquigas-Cannondale) à 7'23"
9. Tom Danielson (USA, Garmin-Cervélo) à 8'15"
10. Jean-Christophe Péraud (FRA, Ag2r La Mondiale) à 10'11"
Article réalisé par Jérémy Bazin l Images : AFP, Sirotti, Bettini l Montages : Jérémy Bazin
Le maillot jaune sur le Tour de France 2011
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