Du 1er au 11 février, Gwendal ressort ses cours. Il vous offre sur Culture Sport une leçon sur l’histoire du sport. Aujourd’hui, découvrez la première partie du premier chapitre.
I. Le sport, l’individu, le corps
A. Première étape : l’hygiénisme
1. Les progrès de la médecine et de l’hygiène
Tout débute avec la révolution pasteurienne de la fin du XIXe siècle. La nécessité d’avoir une hygiène saine, de faire de l’exercice, est alors d’actualité. Le premier sport massif à se développer est la gymnastique. Le tout dans un contexte particulier. En effet, la volonté de donner une hygiène saine à la population se combine avec dimension nationale, celle d’avoir une armée aguerrie. Deux types de gymnastique, symboles de deux institutions différentes, vont alors cohabiter :
- Le premier type de gymnastique est suédois. Per Henrik Ling est à la base de ce modèle. Il crée en 1867 un type de gymnastique bien particulier, combinant la gymnastique « classique » à des exercices réalisés par des kinésithérapeutes. Pour mieux comprendre cette innovation, il faut remplacer la Suède dans son contexte de l’époque, qui était alors un pays misérable, où l’alcoolisme et la tuberculose étaient monnaie courante.
- Le deuxième type de gymnastique est l’œuvre d’Hebert, qui ouvre un institut de gymnastique, ainsi que de course à pied, de saut, de grimper à la corde… Il introduit de plus ce modèle « multi-sportif » dans les collèges et lycées en 1868.
Au début du XXe siècle, le football et le cyclisme sont peu prisés car ce sont des sports qui ne demandent que peu de contraintes du corps. La souffrance dans le sport est récupérée par l’Eglise en plein combat clérico-laïque de ce début de siècle. Ainsi, on observe la création de patronages, de cercles, pour attirer les jeunes par le sport, qui se transforme alors et évolue en tant que moyen d’attraction. Ils y développent la gymnastique par la souffrance du corps. Le sport reste encore l’apanage d’une élite, d’une aristocratie, tandis que les amateurs doivent se prendre en charge, avant tout financièrement.
2. Les discours sur la race
La fin du XIXe siècle est synonyme de l’émergence de théories racistes et nationalistes. La notion de race n’a pas de connotation génétique mais est associée à une nation. Il faut se battre pour dominer les autres, c’est le darwinisme social où « seuls les plus forts survivront ». Au XIXe siècle, le racisme est courant dans la société. Jules Soury va développer une pensée nationaliste, mettant l’accent sur une continuité des traditions. Il va ainsi influencer de nombreux penseurs et hommes politiques, à l’instar de la droite : l’antisémitisme prend de l’ampleur. Chamberlain, intellectuel Wagnérien représentant du pangermanisme, rédige en 1899 Fondements du XIXe siècle. Il y soutient notamment que la race supérieure décrite par Gobineau (« race indo-européenne ») est la race aryenne et est l’ancêtre des classes dirigeantes d’Europe. Selon lui, une race doit dominer les autres, elle doit être forte, et il faut donc pour cela développer l’armée et le sport. Les « blancs » doivent dominer car ils sont supérieurs, idée qui rejoint celle du colonialisme.
En 1904 se tiennent les Jeux Anthropologiques pour ceux que l’on qualifie alors de « primitifs », ce qui reprend l’idée alors courante, et à la connotation quelque peu différente d’aujourd’hui, de racisme. On y exhibe sioux, pygmées et bien d’autres. Le but était en effet de montrer l’infériorité de ces « primitifs ». Pierre De Coubertin interdira par la suite ces jeux pour une question de culture, ces jeux étant selon lui une « mascarade outrageante ».
Il en va de même pour la femme. L’image de la femme dans la société du début XXe est celle d’un corps sain pour une bonne mère. Il lui est donc interdit de pratiquer du sport, c’est un aspect moral, le sport étant une affaire d’hommes. Le sport devient une préparation à la guerre, avant même le service militaire. Quelques femmes vont néanmoins participer aux Jeux Olympiques au début du XXe siècle, à Paris en 1900, dans des sports tels que le tennis ou le golf.
3. Le sport dérivatif et contrainte
La fin du XIXe siècle est une période moralisante. Le corps devient alors un élément dangereux pour une institution telle que l’Eglise, ou encore la classe bourgeoise. Le but était alors de contrôler le corps sans faire naître des sentiments dangereux. Le sport permet ainsi d’évacuer toutes les pulsions sexuelles ; il devient donc un élément dérivatif. Pour De Coubertin, le corps exalte la nudité dans l’Antiquité tout en enlevant le charme érotique. Le corps va alors être contraint par des exercices de gymnastique violents, répétitifs, tout en présentant une dimension naturelle pour permettre au corps des efforts impossibles normalement. L’utilisation de machines pour accentuer la contrainte du corps, comme la bicyclette, devient alors d’actualité.
Article réalisé par Gwendal Le Priellec
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