Guillaume Judas, directeur de la rédaction de Cyclo Passion, nous livre son commentaire sur le parcours de la 98ème édition du Tour de France qui s’élance ce samedi de Vendée.
Culture Sport : La première semaine de course, outre le contre-la-montre par équipes des Essarts, sera marquée par les arrivées au Mont des Alouettes et à Mûr-de-Bretagne ? Le début de Tour, ordinairement dévolu aux sprinteurs, ne sera-t-il pas, cette année, celui des puncheurs ?
Guillaume Judas : Oui, en effet. D’abord, il n’y a pas de prologue, ce qui ne bloquera pas la course. Ensuite, il n’y a pas cette année de bonifications en temps, donc les équipes des sprinteurs ne verrouilleront pas non plus la course pour essayer d’obtenir le maillot jaune dans les premiers jours. De plus, des arrivées difficiles comme au Mont des Alouettes ou à Mûr-de-Bretagne, voire même au Cap Fréhel, peuvent favoriser les puncheurs comme Philippe Gilbert ou Alexandre Vinokourov qui pourront ainsi s’attribuer le maillot par le jeu des places. Ce seront des étapes vraiment ouvertes.
Culture Sport : Et très vite, dès le vendredi suivant le départ, le peloton arrivera sur les premiers contreforts du Tour, dans le Massif Central. Qu’attendre de ces premières étapes dites « de moyenne montagne » ?
Guillaume Judas : Ce ne sont pas des étapes insurmontables. Les organisateurs ont voulu ménager le suspense en montant graduellement en difficulté tout au long de ces trois semaines de course, tant pour l’intérêt de l’épreuve que pour les spectateurs et téléspectateurs. Aussi, l’étape de Super-Besse, avec un final certes relativement difficile, et celle de Saint-Flour, ne créeront pas d’énormes écarts. Encore une fois, un coureur comme Gilbert ou Vinokourov pourra garder la mainmise sur la course, sans qu’il y ait des écarts conséquents, jusqu’à l’arrivée en haute-montagne, à Luz-Ardiden, le 14 juillet. Ce jour là, on entrera dans le vif du sujet.
Culture Sport : La haute montagne, justement. Il y aura certes de belles étapes pyrénéennes avec les arrivées à Luz-Ardiden et au Plateau de Beille. Mais les Alpes ne font-elles pas figure de juge de paix, avec notamment la 18ème étape qui propose le triptyque Agnel-Izoard-Galibier et le lendemain cette courte étape (109,5 km) qui mène à l’Alpe d’Huez ?
Guillaume Judas : En effet. Je pense que l’étape qui arrivera au sommet du Galibier sera surtout une étape d’usure. Certes, l’Agnel est un col difficile, tout comme l’Izoard. Mais l’arrivée au sommet du Galibier ne permettra pas de faire de très gros écarts. Ce sera en fait le dernier round d’observation, qui permettra sans aucun doute d’éliminer les plus faibles, mais pas de dégager le vainqueur final. Par contre le lendemain, l’étape courte entre Modane et l’Alpe d’Huez, avec d’entrée le Télégraphe, puis le Galibier et la montée de l’Alpe, permettra de dessiner définitivement le podium final du Tour, même s’il reste un contre-la-montre le lendemain. Dans ce sens, les organisateurs ont voulu ménager le suspense jusqu’au bout.
Culture Sport : Donc le Tour va se jouer dans la montée de l’Alpe d’Huez, selon vous.
Guillaume Judas : Oui. Il est vrai que le contre-la-montre de Grenoble peut créer des écarts surprenants, comme on l’a vu lors du Critérium du Dauphiné (ndlr : le parcours du contre-la-montre du Dauphiné était le même que celui qui se courra le 23 juillet prochain). Mais au terme de tant d’étapes de montagnes, j’imagine un écart plus important que celui de l’an passé où une quarantaine de secondes seulement séparaient le premier du deuxième du Tour. J’imagine au soir de l’Alpe d’Huez un maillot jaune avec deux minutes d’avance et des choses plus établies.
Culture Sport : Parlons des hommes, maintenant. Quel est votre favori pour ce Tour de France ?
Guillaume Judas : Difficile de ne pas évoquer Alberto Contador, tant il s’est montré dominateur sur les dernières éditions du Tour de France et sur le Giro récemment. Andy Schleck fera le spectacle, mais je ne suis pas sûr qu’il ait toutes les cartes dans son jeu pour contrer un Contador au sommet de son art, lui qui est entré dans ses meilleures années. S’il n’y avait pas le fameux problème du Tribunal Arbitral du Sport et de la décision que l’on attend encore, Contador serait parti pour dominer le cyclisme mondial ou du moins les courses à étapes durant les quatre ou cinq prochaines saisons. Cela dit, physiquement, aujourd’hui, c’est lui qui présente le plus de garanties.
Culture Sport : Et que peut-on espérer des Français sur ce Tour ?
Guillaume Judas : On peut espérer un très beau Tour de Sylvain Chavanel qui est capable de tout, surtout du meilleur, sans doute transcendé par son maillot de champion de France. On peut espérer aussi un coup d’éclat de Thomas Voeckler, notamment lors des dix premiers jours de course. Il reste un coureur excellent, qui de surcroît réalise une saison exceptionnelle. Au niveau du classement général, je suis plus circonspect. Jérôme Coppel semble être le Français qui monte, mais il n’a jamais terminé une course à étapes de trois semaines. Il demeure un bon rouleur, un bon grimpeur aussi, et il peut prétendre à un classement entre la dixième et la quinzième place au classement général. Et j’espère enfin une très bonne performance de Jean-Christophe Péraud qui dispute son premier Tour à 34 ans et qui reste aussi un très bon grimpeur.
Culture Sport : En définitive, on ne va pas s’ennuyer en juillet…
Guillaume Judas : Je le souhaite, comme tout suiveur du cyclisme, parce que le Tour de France est l’épreuve phare de notre sport. Je crois que l’on est tous plus ou moins excités à l’approche de l’échéance. On va je l’espère passer de bons moments.
Vidéo : Guillaume Judas analyse le tracé du Tour 2011
Propos recueillis et vidéo réalisée par Vincent Davayat l Images : DR